Les élections en Afghanistan

De multiples fraudes. Samedi, les observateurs électoraux afghans ont rendu un jugement bien plus sévère que celui de leurs collègues européens sur le déroulement du premier tour du scrutin présidentiel. Forte de 6.968 observateurs, dont 2.488 femmes, répartis dans les quelque 6.200 bureaux de vote ouverts dans le pays, la FEFA (Free and Fair Election Foundation of Afghanistan) a fait part ce week-end de nombreuses irrégularités.

Selon le président de cette organisation indépendante, Nader Nadery, les observateurs ont ainsi constaté «des électeurs munis de plusieurs cartes et votant au nom de femmes», des votes de non adultes, «des fraudes» diverses dont «quelques cas de bourrage d'urnes», et même «dans certains endroits, des hommes armés qui ont malmené le personnel et tenu eux-mêmes les bureaux de vote». La FEFA a également relevé que nombre de bureaux sont restés fermés, comme dans l'Oruzgan (sud), où seulement six sites sur 36 ont ouvert. Toujours d'après Nader Nadery, qui s'est toutefois refusé à donner des chiffres sur l'ampleur des fraudes, deux électeurs se seraient fait couper le doigt - marqué par l'encre indélébile utilisée dans les bureaux de vote pour éviter les votes multiples - par des talibans présumés le jour du vote à Kandahar.

Largement moins déployée, avec seulement 120 observateurs pour tout le pays, la mission d'observation de l'Union européenne (UE) a été nettement moins sévère quant au déroulement du scrutin, comme la plupart des alliés internationaux du gouvernement de Kaboul. Son chef, le Français Philippe Morillon, a jugé le processus «en général bon et équitable», bien que «pas libre» partout en raison des violences et menaces.


Vers un deuxième tour Karzaï-Abdullah

A Bruxelles, l'Union européenne s'est dite préoccupée par ces possibles fraudes, et a également appelé les camps des deux principaux candidats, le président Hamid Karzaï et son ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah, à la retenue. Chacun des deux camps avait affirmé vendredi que son candidat était en tête, alimentant tensions et spéculations. Alors que nombre d'observateurs pariaient avant l'élection sur une victoire d'Hamid Karzaï au premier tour, ils sont de plus en plus nombreux aujourd'hui à évoquer un second tour entre les deux hommes, à l'issue bien incertaine. «La question est maintenant de savoir si Karzaï, qui contrôle la Commission électorale afghane, va accepter un second tour», estimait samedi un diplomate, sous couvert d'anonymat.

Les premiers résultats doivent être annoncés le 3 septembre, et les résultats finaux le 17. Un éventuel deuxième tour aurait lieu début octobre.