et après la fête ... le travail !

«President Obama»: ils sont nombreux les sites des journaux américains à avoir choisi ce simple titre en tête de leur page d’accueil, à l’instar du Los Angeles Times. Mais souvent, les quotidiens allient, sur le web, une allusion à la difficile tâche qui attend le 44ème président des Etats-Unis… avec une photo glamour du «first couple», complice et élégant lors des bals organisés ce mardi à Washington. «Promesses d’espoir et travail ardu» écrit le Washington Post.

Car plus que la cérémonie en elle-même, réglée comme du papier à musique, excepté le faux-pas du président de la Cour suprême qui s’est emmêlé dans le déroulé du serment - c’était le discours d’Obama qui était attendu au tournant. Et «en 20 minutes environ, il a balayé huit années de mauvais choix et de politiques désastreuses du président Bush et promis de réaffirmer l’engagement de l’Amérique avec ses idéaux les plus sacrés», analyse l’éditorial du New York Times.

Alors que la Bourse de New York a encore nettement chuté ce mardi, le Wall Street Journal estime, lui, que «les principes fondateurs d’Obama étaient difficiles à cerner. Il a reconnu que le pouvoir du marché “pour générer de la richesse, pour renforcer la liberté, est sans pareil” tout en avertissant qu’il peut “échapper à tout contrôle”.» Cependant, le quotidien assure aussi que le message sur la «nouvelle ère de responsabilité» du nouveau président est «utile» «pour les Américains de toutes trajectoires - des PDG de Wall Street aux pères célibataires comme aux lobbyistes de l’association des retraités à Washington».

Le China Daily loue le bilan diplomatique de l'administration Bush
Mais l’investiture d’Obama n’a pas seulement été scrutée à la loupe par les Américains. Le China Daily, quotidien officiel chinois en anglais, apporte un contrepoint dans le concert de louanges envers Obama puisqu’il vante… l’administration Bush et son bilan en matière de relations sino-américaines et le journal s’inquiète «de savoir si le nouveau président va ignorer les progrès durement accomplis dans les liens bilatéraux». Quant au quotidien japonais Asahi Shimbun, il prévient que «ce que les gens attendent d’Obama désormais, au-delà des beaux discours, ce sont des résultats».

En Europe aussi, les fidèles alliés Britanniques se concentrent sur la partie «travail». Le Times reprend les mots du président et affirme que «l’Amérique est de nouveau prête à commander». Et pour aller plus loin, le quotidien propose aussi une «traduction» du discours de ce mardi: deux commentateurs expliquant «ce qu’il signifie vraiment». The Independent affirme bien qu’«Obama offre de l’espoir au monde», son site se concentre sur les faits et consacre sa une à la première décision du nouveau président: celle d'ajourner les procédures judiciaires à Guantánamo.

«C’est la banalité du réel qu'Obama va maintenant affronter»
La presse espagnole détonne, elle aussi. Non parce qu’elle se montre sceptique sur le cas Barack… mais parce qu’elle résiste à l’Obamania mondiale. Et un blogueur d’El Mundo d’ironiser: «Reste-t-il quelqu’un ici, sur la troisième planète du système solaire, qu’il soit animal, végétal, minéral ou guépard, qui ne soit pas au courant qu’il y a un nouveau président aux Etats-Unis?». Quant à El País, il consacre pour la deuxième journée consécutive son éditorial à un tout autre sujet que les Etats-Unis, en l’occurrence, une affaire d’espionnage à la Communauté de Madrid. En Espagne comme ailleurs, on attendra donc les actes pour reparler d’Obama.

Un sentiment résumé dans le quotidien suisse Le Temps: «Ce jour si longuement guetté marque la plongée dans l’action. C’est la complexité, l’impatience, la banalité du réel que Barack Obama va maintenant affronter. […] Que restera-t-il alors des magies du faiseur de rêve? Nul ne le sait. Mais Barack Obama n’en conserverait qu’une étincelle, et le monde s’en porterait déjà mieux.»

«Reconstruction», «Promesse», «défis»: ces mots reviennent à longueur de colonnes ce matin dans la presse. Et si l’ensemble des éditorialistes saluent l’investiture du président Obama, certains évoquent leur scepticisme. «Enfin les difficultés commencent», lance ainsi Etienne Mougeotte dans le Figaro. «Les Américains ont élu Obama pour conjurer la crise, relancer l’économie, sauvegarder leur logement, protéger leur retraite, améliorer leur assurance-maladie, défendre leur environnement». Bref, conclut l’éditorialiste, «Encore faudra-t-il que Barack Obama se donne les moyens de tenir ses promesses».

D'ailleurs, titre La Tribune, «pour Obama, le redressement commence aujourd’hui». Au menu de cette première journée à la Maison Blanche: le retrait d’Irak, la fermeture du centre de Guantanamo et le plan anti-crise. «Le premier jour au pouvoir donne le ton d’une présidence» rappelle certains.

Des millions de personnes saisies par «l'Obamania»

La presse revient bien sûr en détail sur la cérémonie d’investiture qui a rassemblé hier près de deux millions de personnes sur le Mall à Washington. Le Parisien-Aujourd’hui en France retrace «le film du jour» de cette cérémonie millimétrée quand le Figaro raconte comment «toute la nuit, Washington a dansé dans les soirées chics et surpeuplées».

Libération propose une galerie de portraits de ces Américains «qui ont traversé le pays pour voir Obama». «C'est un jour de joie, pas seulement pour les Noirs mais pour tout le monde, il n'y a qu'à regarder autour de soi et l'on voit un vrai patchwork de gens de cultures différentes qui sont venus assister à cet événement incroyable.»

«Le temps d’une cérémonie dans un froid glacial, l’Obamania a réchauffé la planète toute entière» s'enthousiasme Hervé Cannet dans La Nouvelle République du Centre.

En France, aussi, on a fêté l’investiture d’Obama. Comme à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis. Interrogés par Le Parisien, une dizaine de jeunes racontent leur soirée. Scotchés devant leur télé, ils n’ont pas perdu une miette de la cérémonie. Et du discours d'investiture d'Obama.

«Un discours de crise»
Ce discours d’investiture justement est longuement commenté. Certains journaux, comme Libération ou le Figaro, publient le texte dans son intégralité. Pour Libération, Obama s'est posé en président de crise ouvrant «l'ère des responsabilités». «Point de grande envolée, point d’effet oratoire soulevant à dessein la foule» souligne Laurent Joffrin dans son éditorial. «Barack Obama a prononcé un discours sobre, réfléchi, loin du charisme hypnotique qui lui avait permis de lancer sa campagne.»

Pour Michel Lépinay de Paris Normandie, Obama «a accompli l’exercice avec éloquence, faisant la synthèse de l’ensemble des positions développées pendant sa campagne électorale». Même tonalité dans La Presse de la Manche: le discours a été «généreux, rassembleur, pacificateur». Obama «incarne la fin d’un cauchemar, de la ségrégation et du racisme», écrit Jean Levallois.