Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
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Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
Par GUILLAUME DUVAL Rédacteur en chef d’Alternatives économiques
Auteur de : «la France d’après, rebondir après la crise», aux éditions les Petits Matins
L’Euro est gravement menacé. Ce projet a été porté depuis quarante ans par tous les dirigeants français successifs, de droite comme de gauche. Pourtant, jusqu’ici, les médias, la classe politique, les plus hauts responsables de l’Etat se sont fort peu préoccupés de la crise actuelle. Faute d’engagement suffisant des dirigeants français de tous bords dans la résolution de la crise, la zone euro risque d’éclater, emportant avec elle l’ensemble de la construction engagée depuis soixante ans.
En 1999, l’avènement de l’euro avait pourtant marqué une rupture décisive avec la conception libérale de l’Europe-marché : les Etats acceptaient - enfin - de se doter d’institutions communes fortes dans un domaine central, non seulement pour l’activité économique, mais aussi pour l’existence politique de l’Europe, dans le monde comme vis-à-vis de ses propres citoyens. Et contrairement à ce qu’on entend ces temps-ci, l’euro nous a apporté de nombreux bénéfices. Les taux d’intérêt ont été ramenés à des niveaux historiquement bas, facilitant l’activité économique et l’emploi. C’est d’ailleurs une part du problème d’aujourd’hui : ces taux étaient même trop bas pour une partie de l’Europe poussant à un endettement excessif. Dans la crise, l’euro nous a aussi protégés des turbulences monétaires qui avaient durablement plombé l’Europe lors de la récession de 1993. Tandis que la puissance de feu de la Banque centrale européenne (BCE) a permis de maintenir à flot, y compris au Royaume-Uni, un système bancaire menacé d’écroulement par les désordres de la finance américaine. On a aussi pu vérifier qu’avec l’euro l’Europe n’était pas devenue «allemande» contrairement à ce que prétendent ses adversaires pour flatter le chauvinisme supposé des Français : en avril, c’est le président de la Bundesbank qui a démissionné du directoire de la BCE lorsque celui-ci a décidé, contre son avis, de venir au secours de la Grèce. Enfin, l’euro est bien entendu la seule monnaie susceptible, avec le yuan chinois, de jouer dans la même cour que le dollar.
Bref, oui, ça valait le coup de faire l’euro et, oui, ça vaut le coup de le défendre aujourd’hui. Le plus déprimant dans la crise actuelle, c’est que les problèmes qui menacent de tuer la monnaie unique sont en réalité limités : les 350 milliards d’euros de la dette grecque, colossale au regard du PIB grec, ne pèsent jamais que 3,7% du PIB de la zone euro. Plus largement, que ce soit en termes d’endettement des ménages, deux fois plus faible qu’outre-Atlantique, d’échanges extérieurs, quasiment équilibrés, ou même de dette publique, très inférieure à la dette américaine et en croissance beaucoup moins rapide, les «fondamentaux» de la zone euro sont nettement plus sains que ceux de l’économie américaine.
Bien sûr, cette jeune construction - douze ans - comporte encore de nombreux défauts. Il faut tout d’abord inventer des solutions immédiates pour régler le cas grec, pour lequel rien n’était prévu dans les traités. Et il n’en existe pas qui n’implique pas de risques et/ou de pertes financières pour les autres pays de la zone. Une solidarité qu’il faut accepter le plus vite possible, faute de quoi cette affaire dure et s’aggrave. Au-delà, il faut aussi changer les règles du jeu interne pour éviter le retour de crises analogues. Harmonisation fiscale, limitation de l’endettement privé excessif, communautarisation d’une partie des dettes publiques, investissements communs d’ampleur autour de la transition écologique… les solutions sont connues, même si ce ne sont pas du tout celles préconisées jusqu’ici par la Commission européenne autour d’une austérité budgétaire et salariale permanente et généralisée qui aggraverait les difficultés de la zone au lieu de les résoudre. Mais ce qui manque le plus, manifestement, c’est la volonté politique de surmonter cette crise. Chez d’autres, bien sûr, et notamment en Allemagne où la coalition au pouvoir fait preuve d’une pusillanimité très inquiétante. Mais aussi du côté des élites françaises qui paraissent avoir renoncé à toute ambition européenne.
Après avoir agi avec beaucoup d’à propos pendant la phase aiguë de la crise financière pour susciter une réponse coordonnée à l’échelle européenne et mondiale, le président de la République s’est mis aux abonnés absents, visiblement préoccupé surtout de préparer une campagne présidentielle difficile. Nicolas Sarkozy n’a certes jamais montré vis-à-vis du projet européen et de la relation franco-allemande un intérêt comparable à celui de Charles de Gaulle, Valéry Giscard d’Estaing ou François Mitterrand, et sa crédibilité à l’égard de nos voisins est très affaiblie par sa gestion incohérente des finances publiques. Mais le sauvetage de l’euro ne peut pas reposer sur des personnalités aussi dépourvues de poids politique que José Manuel Barroso, Jean-Claude Juncker ou Herman Van Rompuy : si le président de la République française ne s’engage pas davantage, la zone euro éclatera. Mais Nicolas Sarkozy est très loin d’être seul en cause. L’attitude de la gauche sur ce dossier est tout aussi navrante : aucun(e) de ses nombreux(ses) candidats(es) à la magistrature suprême n’a jusqu’ici jugé utile de s’emparer véritablement du sujet, notamment pour mettre le Président face à ses responsabilités à l’égard de l’euro. Si au bout du compte la zone euro devait éclater, les élites françaises auraient eu, par leur passivité, une responsabilité déterminante dans cet échec dont la France paierait le prix pendant des dizaines d’années…
En 1999, l’avènement de l’euro avait pourtant marqué une rupture décisive avec la conception libérale de l’Europe-marché : les Etats acceptaient - enfin - de se doter d’institutions communes fortes dans un domaine central, non seulement pour l’activité économique, mais aussi pour l’existence politique de l’Europe, dans le monde comme vis-à-vis de ses propres citoyens. Et contrairement à ce qu’on entend ces temps-ci, l’euro nous a apporté de nombreux bénéfices. Les taux d’intérêt ont été ramenés à des niveaux historiquement bas, facilitant l’activité économique et l’emploi. C’est d’ailleurs une part du problème d’aujourd’hui : ces taux étaient même trop bas pour une partie de l’Europe poussant à un endettement excessif. Dans la crise, l’euro nous a aussi protégés des turbulences monétaires qui avaient durablement plombé l’Europe lors de la récession de 1993. Tandis que la puissance de feu de la Banque centrale européenne (BCE) a permis de maintenir à flot, y compris au Royaume-Uni, un système bancaire menacé d’écroulement par les désordres de la finance américaine. On a aussi pu vérifier qu’avec l’euro l’Europe n’était pas devenue «allemande» contrairement à ce que prétendent ses adversaires pour flatter le chauvinisme supposé des Français : en avril, c’est le président de la Bundesbank qui a démissionné du directoire de la BCE lorsque celui-ci a décidé, contre son avis, de venir au secours de la Grèce. Enfin, l’euro est bien entendu la seule monnaie susceptible, avec le yuan chinois, de jouer dans la même cour que le dollar.
Bref, oui, ça valait le coup de faire l’euro et, oui, ça vaut le coup de le défendre aujourd’hui. Le plus déprimant dans la crise actuelle, c’est que les problèmes qui menacent de tuer la monnaie unique sont en réalité limités : les 350 milliards d’euros de la dette grecque, colossale au regard du PIB grec, ne pèsent jamais que 3,7% du PIB de la zone euro. Plus largement, que ce soit en termes d’endettement des ménages, deux fois plus faible qu’outre-Atlantique, d’échanges extérieurs, quasiment équilibrés, ou même de dette publique, très inférieure à la dette américaine et en croissance beaucoup moins rapide, les «fondamentaux» de la zone euro sont nettement plus sains que ceux de l’économie américaine.
Bien sûr, cette jeune construction - douze ans - comporte encore de nombreux défauts. Il faut tout d’abord inventer des solutions immédiates pour régler le cas grec, pour lequel rien n’était prévu dans les traités. Et il n’en existe pas qui n’implique pas de risques et/ou de pertes financières pour les autres pays de la zone. Une solidarité qu’il faut accepter le plus vite possible, faute de quoi cette affaire dure et s’aggrave. Au-delà, il faut aussi changer les règles du jeu interne pour éviter le retour de crises analogues. Harmonisation fiscale, limitation de l’endettement privé excessif, communautarisation d’une partie des dettes publiques, investissements communs d’ampleur autour de la transition écologique… les solutions sont connues, même si ce ne sont pas du tout celles préconisées jusqu’ici par la Commission européenne autour d’une austérité budgétaire et salariale permanente et généralisée qui aggraverait les difficultés de la zone au lieu de les résoudre. Mais ce qui manque le plus, manifestement, c’est la volonté politique de surmonter cette crise. Chez d’autres, bien sûr, et notamment en Allemagne où la coalition au pouvoir fait preuve d’une pusillanimité très inquiétante. Mais aussi du côté des élites françaises qui paraissent avoir renoncé à toute ambition européenne.
Après avoir agi avec beaucoup d’à propos pendant la phase aiguë de la crise financière pour susciter une réponse coordonnée à l’échelle européenne et mondiale, le président de la République s’est mis aux abonnés absents, visiblement préoccupé surtout de préparer une campagne présidentielle difficile. Nicolas Sarkozy n’a certes jamais montré vis-à-vis du projet européen et de la relation franco-allemande un intérêt comparable à celui de Charles de Gaulle, Valéry Giscard d’Estaing ou François Mitterrand, et sa crédibilité à l’égard de nos voisins est très affaiblie par sa gestion incohérente des finances publiques. Mais le sauvetage de l’euro ne peut pas reposer sur des personnalités aussi dépourvues de poids politique que José Manuel Barroso, Jean-Claude Juncker ou Herman Van Rompuy : si le président de la République française ne s’engage pas davantage, la zone euro éclatera. Mais Nicolas Sarkozy est très loin d’être seul en cause. L’attitude de la gauche sur ce dossier est tout aussi navrante : aucun(e) de ses nombreux(ses) candidats(es) à la magistrature suprême n’a jusqu’ici jugé utile de s’emparer véritablement du sujet, notamment pour mettre le Président face à ses responsabilités à l’égard de l’euro. Si au bout du compte la zone euro devait éclater, les élites françaises auraient eu, par leur passivité, une responsabilité déterminante dans cet échec dont la France paierait le prix pendant des dizaines d’années…
Par GUILLAUME DUVAL Rédacteur en chef d’Alternatives économiques
Auteur de : «la France d’après, rebondir après la crise», aux éditions les Petits Matins
Jeanclaude- Député
- Nombre de messages : 7476
Age : 77
Date d'inscription : 26/09/2008
Re: Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
Guillaume Duval
Rédacteur en chef du mensuel Alternatives Economiques
Rédacteur en chef du mensuel Alternatives Economiques
Guillaume DUVAL, 51 ans, est rédacteur en chef du mensuel Alternatives Economiques. Ingénieur de formation, il a travaillé pendant 13 ans pour différentes multinationales avant de rejoindre la coopérative Alternatives économiques.
Il est l’auteur notamment de Le libéralisme n’a pas d’avenir (La Découverte, 2003), et Sommes-nous des paresseux ? Et 30 autres questions sur la France et les Français (Le Seuil, 2008).
Re: Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
merci de ces infos mais quel en est le but ?
Jeanclaude- Député
- Nombre de messages : 7476
Age : 77
Date d'inscription : 26/09/2008
Re: Pour l’euro, avant qu’il ne soit trop tard
Les banquier français serrent les fesses, car si le Portugal est l'Italie subissaient les mêmes attaques qu'à subit la grèce de la part des spéculateurs, la ruine ne serait pas loin pour nos banques.
Georges- Président du Conseil Général
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Date d'inscription : 20/07/2008
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