Trichet : aucun pays n'est le "maillon faible" de la zone euro

Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne, a déclaré ce matin à Paris que c'était une erreur de jugement de considérer que la zone euro avait un ou des maillons faibles susceptibles de fragiliser la monnaie unique.

Il a estimé aussi que chacun des 16 pays de la zone devaient être "à la hauteur de ses responsabilités". "Nous sommes dans une situation difficile, a-t-il déclaré. Nous ne devons jamais oublier d'avoir en vue le moyen et le long terme".

Les propos de Trichet interviennent au moment même où les investisseurs sont de plus en plus incités, compte tenu de la dégradation de la conjoncture, à s'interroger sur ce que feraient les pays de la zone euro si l'un d'entre eux se retrouvait en situation de faillite et ne pouvait plus lever d'argent sur les marchés.

Cette question hante un peu plus les marchés depuis les déclarations tenues par le ministre des finances allemand Peer Steinbrück mercredi dernier. "Les traités de la zone euro ne prévoient aucune aide en faveur de pays devenus insolvables, mais en réalité les autres Etats seraient obligés de secourir ceux qui rencontrent des difficultés," a-t-il déclaré.

Lorsqu'on lui a demandé si l'Allemagne, dont les finances sont considérées comme les plus solides, laisserait la zone euro éclater plutôt que d'apporter son soutien, il a fait cette réponse : "Il nous faudrait intervenir".

Après un article du Spiegel expliquant que le ministère des finances allemand travaillait sur les moyens de venir en aide à un pays en difficultés, le gouvernement allemand a rétorqué aujourd'hui que cette information "ne correspondait pas aux faits". Le ministère des finances outre-Rhin a invité les pays en situation budgétaire trop fragile à se discipliner.

La crise dans les pays de l'Est, qui fragilise notamment l'Autriche car son système bancaire est très exposé à cette région, ainsi que la dégradation des finances publiques de pays comme l'Irlande, l'Italie, l'Espagne et la Grèce font craindre qu'un pays de la zone euro devienne insolvable si l'économie mondiale continue de se replier. L'incertitude fragilise le taux change de la monnaie européenne, qui baisse depuis plusieurs semaines.

Ce débat autour de la solidarité communautaire inclut la question de savoir s'il faut oui ou non donner le droit à la BCE d'acheter directement la dette des pays de la zone euro afin de soulager leurs finances publiques. Contrairement à d'autres banques centrales, la BCE ne peut actuellement pas utiliser cet outil aujourd'hui et il serait compliqué pour elle de favoriser une partie de ses membres au détriment d'autres.

Certains s'inquiètent que l'arme des taux d'intérêt et de l'adoption de politiques monétaires moins restrictives ne suffisent plus et qu'il faille absolument injecter directement de l'argent dans l'économie, ce qui est difficile pour la BCE compte tenu de ses statuts.

Ernest-Antoine Seillière, le président de Business Europe, a de son côté demandé que les banques centrales ou les Etats européens achètent directement des titres de dette d'entreprises afin de leur éviter de faire faillite. De telles mesures sont plus faciles à mettre en place en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.