Le génome humain porte les traces d'une sélection naturelle récente
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Le génome humain porte les traces d'une sélection naturelle récente
Le génome humain porte les traces d'une sélection naturelle récente
LE MONDE | 12.02.08 | 14h42 •
Voilà qui fait d'Homo sapiens un animal presque comme les autres. La domestication du feu, la maîtrise d'outils toujours plus complexes ou de l'agriculture, l'ambition permanente d'échapper aux forces de la nature... Rien n'y fait. Depuis qu'il a quitté l'Afrique de l'Est, voilà moins de cent mille ans, l'homme moderne reste soumis aux lois archaïques de la sélection naturelle. Confirmant de récents travaux dirigés par John Hawks (université du Wisconsin), une équipe de chercheurs français et espagnols vient d'en apporter une nouvelle et originale démonstration.
LexiqueSNP (Single Nucleotide Polymorphisms). Tout fragment d'ADN est formé d'une séquence de quatre molécules - ou quatre "lettres" - différentes : A (Adénine), T (Thymine), C (Cytosine) et G (Guanine).
Un SNP (prononcer "snip") substitue une lettre à une autre dans une séquence donnée. Par exemple, AAGCCTA peut devenir AAGCTTA. Ces variations peuvent se traduire par des changements physiologiques ou être "silencieuses" (ou "muettes").
LE MONDE | 12.02.08 | 14h42 •
Voilà qui fait d'Homo sapiens un animal presque comme les autres. La domestication du feu, la maîtrise d'outils toujours plus complexes ou de l'agriculture, l'ambition permanente d'échapper aux forces de la nature... Rien n'y fait. Depuis qu'il a quitté l'Afrique de l'Est, voilà moins de cent mille ans, l'homme moderne reste soumis aux lois archaïques de la sélection naturelle. Confirmant de récents travaux dirigés par John Hawks (université du Wisconsin), une équipe de chercheurs français et espagnols vient d'en apporter une nouvelle et originale démonstration.
LexiqueSNP (Single Nucleotide Polymorphisms). Tout fragment d'ADN est formé d'une séquence de quatre molécules - ou quatre "lettres" - différentes : A (Adénine), T (Thymine), C (Cytosine) et G (Guanine).
Un SNP (prononcer "snip") substitue une lettre à une autre dans une séquence donnée. Par exemple, AAGCCTA peut devenir AAGCTTA. Ces variations peuvent se traduire par des changements physiologiques ou être "silencieuses" (ou "muettes").
Stéphane FoucartHapMap. Ce projet, né en 2002 d'une collaboration scientifique internationale, vise à cartographier les variations génétiques du génome humain - en particulier les SNP.
[-] fermerSelon ses travaux, publiés dans la dernière livraison de la revue Nature Genetics, lundi 11 février, la répartition des variations génétiques élémentaires (Single Nucleotide Polymorphisms, ou SNP) dispersées dans le génome humain trahit une sélection naturelle intervenue dans un tout proche passé - moins de soixante mille ans. Du même coup, les chercheurs sont parvenus à identifier un ensemble de 582 gènes sur lesquels cette pression sélective récente s'est opérée. Ces variations génétiques marquent les différences visibles (couleur de la peau, taille, constitution capillaire, etc.) et invisibles (susceptibilité, résistance à certaines maladies, etc.) entre les populations.
"C'est la première fois que l'on montre, à l'échelle du génome humain dans son ensemble, que certaines différences physiques et physiologiques entre populations résultent de la sélection naturelle", explique Lluis Quintana-Murci (CNRS, Institut Pasteur), coauteur de ces travaux. Sur cette question, deux écoles s'affrontent. D'un côté ceux, parfois qualifiés de "neutralistes", pour qui deux populations distantes voient les génomes de leurs individus évoluer différemment sous l'effet du seul hasard, c'est-à-dire d'une "dérive génétique". En face, ceux pour qui les populations se différencient principalement sous la pression de leur environnement.
Pour trancher, les auteurs ont étudié un échantillon d'environ 200 personnes de différentes origines. Ils y ont observé la répartition de ces SNP (prononcer "snip") en fonction de leur nature. Ceux dits "silencieux", réputés dépourvus d'effet physiologique. Et ceux qui conduisent à une modification de la protéine produite par un gène. Schématiquement, si seul le hasard était en cause, toutes ces petites mutations - silencieuses ou non - auraient la même répartition entre populations.
Or ce n'est pas le cas. Les chercheurs observent que les SNP les plus différenciés entre groupes - fréquents dans l'un, absents ou presque dans l'autre - ont un effet physiologique. Ces petites mutations ne se sont donc pas produites par hasard, mais sous l'effet de la "sélection positive", celle qui favorise certains traits. "Par exemple, nous avons observé une mutation présente à 85 % chez les populations africaines et quasi absente des populations européennes, illustre M. Quintana-Murci. Or cette mutation se produit sur un gène dont on sait qu'il est impliqué dans la sévérité des crises de paludisme."
Les chercheurs ont également identifié des différences entre populations portant sur des gènes impliqués dans l'immunité, le diabète, la capacité à digérer les sucres, l'hypertension... Ce dernier exemple traduit, à l'échelle génétique, la plus grande susceptibilité de certains groupes ethniques aux maladies cardio-vasculaires.
Cependant, ces variantes portent sur une proportion "infinitésimale" du génome humain, selon Lluis Quintana-Murci. En outre, ajoute le chercheur, "les différences morphologiques, qui sont à nos yeux si importantes dans l'idée que nous nous faisons des groupes ethniques, sont parfois totalement accidentelles''".
"L'un des gènes soumis à une sélection récente que nous avons identifié, appelé EDAR, est ainsi impliqué dans l'épaisseur des cheveux, la forme de la dentition et les caractéristiques de sudation : la sélection d'une population sur sa tendance à transpirer peu - afin de limiter les pertes thermiques - pourra donc avoir un impact sur sa physionomie, mais cette incidence ne sera que fortuite", précise le généticien.
Les chercheurs ont également remarqué que des mutations dites "délétères" - sur des gènes associés à des maladies - sont présentes avec la même fréquence dans toutes les populations en Europe, en Asie ou en Afrique, et ne concernent qu'un faible pourcentage des individus. "Cela signifie que la "sélection négative'' (celle qui défavorise certains traits) s'est appliquée de la même façon en Europe, en Asie et en Afrique pour maintenir à de très faibles fréquences les mutations responsables de maladies", dit M. Quintana-Murci.
Pour mener leur démonstration, les auteurs de ces travaux ont utilisé la base de données du consortium HapMap. Celle-ci, précise Christian Biémont (université Lyon-I, CNRS), couvre un échantillon "de populations issues de seulement quatre origines : Nigeria, Japon, Chine et Etats-Unis/Europe de l'Ouest et du Nord". "Il faut donc être prudent sur les conclusions et la validité des tests statistiques", tempère M. Biémont.
"Actuellement, nous ne comprenons pas très bien la signification des SNP, ajoute-t-il. Le présent travail a le mérite d'avoir essayé de les associer à certains gènes de prédisposition à des maladies, mais on est encore loin de comprendre l'impact réel de ces associations." Outre leur intérêt fondamental, ces travaux ouvrent donc la voie à des recherches ultérieures en génétique médicale.
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