89% des Corses contre l'indépendance

89% des Corses, parmi lesquels 59% de sympathisants nationalistes, ne souhaitent pas que la Corse devienne indépendante, selon un sondage Ifop publié aujourd'hui par le mensuel Corsica.

Seuls 10% des sondés, dont 41% de nationalistes, espèrent l'indépendance de l'île, tandis qu'1% ne se prononcent pas.

Le concept d'autonomie séduit davantage: 51% des personnes interrogées sont favorables à une gouvernance locale élargie. Parmi eux, 87% se réclament du nationalisme, chiffre qui confirme la montée en puissance des nationalistes modérés.

Selon l'enquête, ce souhait d'autonomie n'est pas motivé par une idéologie mais par l'espoir d'une résolution des problèmes économiques. Interrogés sur les questions sociétales, il apparaît que le pouvoir d'achat préoccupe davantage les Corses (51%) que l'environnement (10%) ou la sécurité des biens et des personnes (6%).

Pour 45% des personnes sondées, les problèmes actuels de l'île sont le fruit de la politique des différents gouvernements en Corse; 14% d'entre elles estimant que les nationalistes en sont responsab

Ce que les Corses n'ont pas apprécié, c'est que Nicolas Sarkozy, qui montre par là qu'il ne les connaît pas, fasse de leur île la terre de son caprice.



Le résultat le plus spectaculaire du sondage IFOP dont nous avons passé commande avec notre partenaire Radio bleue frequenza mora, est dans le fait qu'une majorité de Corses se déclare favorable à toujours plus d'autonomie pour l'île.
Un renversement de tendance tel qu'on peut penser à la victoire d'un certain type de nationalisme qu'on qualifiera de modéré et auquel les électeurs à la législative puis à la municipale, ont accordé récemment leur confiance, comme force d'opposition. Ce serait aller vite en besogne.
À y regarder de plus près, les préoccupations des Corses, dans des proportions bien plus marquées que dans l'ensemble du pays, vont au pouvoir d'achat et à l'emploi (voir pages 38 et suivantes). Et quand on leur demande quels sont les maux qui expliquent le malaise de l'île, le retard économique et son isolement géographique sont les réponses qui gagnent le plus de terrain.
Mais - cela doit retenir toute notre attention - la raison qu'ils avancent depuis 2000, date de référence la plus ancienne de l'IFOP, comme la cause déterminante de toutes les dérives, c'est bien la politique des différents gouvernements en Corse.
Il y a là de leur part une constante qui pourrait expliquer lassitude et fatalisme avec lesquels ils avaient cru pouvoir rompre en mai 2007. En portant, avec enthousiasme, Nicolas Sarkozy à la tête de l'État. Ils l'ont fait par tradition conservatrice, mais aussi par un retour sur affection avec un responsable politique qui disait les aimer comme personne ne les avait jamais aimés.

De ce point de vue, notre sondage est explicite : ils en sont sacrément revenus en portant leur défiance à la même hauteur que leurs suffrages au second tour de l'élection présidentielle. Et leur sévérité est elle-même à la hauteur de la déception qu'ils éprouvent. Ainsi, un sondage du Journal du Dimanche indiquait que 61 % des Français fustigeaient le limogeage de Dominique Rossi, le premier flic de l'île, tenu pour responsable des petits désagréments vécus par Christian Clavier, l'ami du président. Les insulaires sont encore plus nombreux (67 %) à condamner ce que le député François Giacobbi, président du conseil général de la Haute-Corse, a appelé une « comédie d'État ». Ce que les Corses n'ont guère apprécié, c'est que Nicolas Sarkozy, qui montre par là qu'il ne les connaît pas, fasse de leur île la terre de son caprice.

De l'affaire Bonnet à l'affaire Clavier, d'un préfet incendiaire à un amuseur pris trop au sérieux, on assiste à une perte de crédit continuelle du pouvoir central. Et l'autonomie devient en quelque sorte une valeur refuge pour des citoyens en déshérence comme l'or l'est pour les boursicoteurs désemparés.

Si les Corses misent désormais sur un nouveau type de gouvernance, fondée sur la proximité, c'est pour qu'on règle leurs problèmes au quotidien, par pur pragmatisme. Ce sont d'ailleurs les publics les plus fragilisés sur le plan économique qui rallient en majorité le camp de l'autonomie. Mais si un jour quelqu'un leur apporte la preuve qu'il y a mieux, au mieux de leurs intérêts, ils changeront aussi sec d'avis. On est donc loin, très loin, des débats idéologiques et des problématiques d'évolution institutionnelle qui ont dominé les dernières décennies.