La crise contraint le FN à corriger sa stratégie

La convention « du projet présidentiel » du 19 novembre sera l'occasion de marteler les grandes orientations et propositions du FN, mais sans entrer dans les détails.

Au Front national aussi, on marche sur des oeufs face à la crise. Même si Marine Le Pen se targue de l'avoir, dès 2008, prédit et annoncée. Car devant la tournure des événements dans la zone euro, mais aussi face au calendrier de campagne de ses adversaires, plus tardif que le sien, un débat sur l'opportunité de mettre en avant un projet détaillé est monté dans le parti d'extrême droite. « Ce n'est pas la peine de donner des arguments à nos adversaires », glisse un cadre du FN. Et la candidate de repenser la stratégie de présentation de son programme. Avec à l'esprit que, dans sa conquête d'un électorat plus large et sa volonté d'un « pôle de rassemblement national » pour les législatives, elle joue gros en termes de crédibilité.

Si la convention « du projet présidentiel » du 19 novembre est maintenue, elle sera l'occasion d'en marteler les grandes orientations et propositions -« le protectionnisme, la liberté monétaire, un Etat fort », précise Florian Philippot, directeur stratégique de la campagne -mais sans entrer dans les détails.

« Faire de la pédagogie »

« On s'attend à une aggravation de la situation, à une modification très importante de la loi de Finances, ce qui aura des conséquences pour notre chiffrage. Le 19 novembre, le projet ne sera pas détaillé comme il aurait dû l'être, et notamment tout le volet économique », reconnaît le vice-président du FN, Louis Aliot, directeur opérationnel de la campagne de Marine Le Pen et chargé du projet. Il vise plutôt désormais janvier ou février 2012. « Nous avions prévu la crise, mais peut-être pas tous ses effets. La question est de savoir maintenant ce qu'on fait », avoue-t-il.

Au sein du FN, on s'interroge sur l'impact que la crise peut avoir sur la candidature de Marine Le Pen. « A court terme, le gouvernement a des cartes en main. Mais nous sommes à un moment crucial, avec une situation économique extrêmement volatile. Cela peut peser considérablement sur le scrutin. Or il ne faut pas se contenter de poser un diagnostic, il faut proposer les bons remèdes », avance un membre de l'équipe de campagne. Son entourage souligne l'importance de « faire de la pédagogie », en particulier sur « la sortie concertée de l'euro ».

Marine Le Pen en baisse dans les sondages

« Il y a six mois, cela déstabilisait plus que cela rassurait, dans notre propre électorat, notamment sur le remboursement de la dette, observe le souverainiste Paul-Marie Coûteaux, président du Rassemblement pour l'indépendance de la France (RIF) et porte-parole de campagne de Marine Le Pen.

Aujourd'hui, nous sommes dans l'attente d'une vérification de ce que nous annoncions. » Florian Philippot veut voir dans la montée du sentiment chez les Français que l'euro est un « handicap » -41 % dans une enquête Ifop/« JDD » contre 34 % en août 2010 -« la validation » du discours de Marine Le Pen.

Une validation qui ne se vérifie pas dans les derniers sondages, en baisse de 1 à 2 points, la créditant de 14 à 17 % au premier tour de la présidentielle, sauf chez BVA, où elle gagne 3 points à 19 %. Les sondeurs expliquent ce reflux par une séquence très favorable au PS. Mais « si la crise perdure, il y aura soit une prime aux candidats qui apparaissent dans le jeu car on a besoin de réassurance, soit un vote sanction, estime Jérôme Fourquet à l'Ifop. Une seule chose est sûre : si l'on demande de nouveaux sacrifices aux Français pour sauver la Grèce ou d'autres pays, cela donnera de l'eau au moulin de Marine Le Pen ».