Justice - La mère de Ryan déchue de son autorité parentale

Mina T., cheveux teints au henné tirés en chignon, remonte machinalement sa paire de lunettes de vue. Assise, mardi, sur le banc des prévenus de la 15e chambre du tribunal correctionnel de Paris, la jeune femme de 36 ans a le visage fermé. Mince dans un jean délavé et une tunique fleurie, elle ne sait que répondre de son geste, jugé « inacceptable et ignoble » par son avocat lui-même. Selon les experts psychologues, sa cliente, accusée d’avoir abandonné son fils Ryan, alors âgé de 3 ans, au beau milieu d’un restaurant Quick de la place Clichy (Paris XVIIe), le 26 juin 2007, avant de s’envoler pour son pays d’origine, « n’élabore pas ». « Personnalité immature, impulsive, caractérielle, manipulatrice »… Les qualificatifs fusent de la bouche du procureur Sylvain Barbier Sainte-Marie, « inquiet des conséquences graves » d’un tel acte sur le garçonnet.

Mina, aujourd’hui, ne vit plus avec aucun de ses trois jeunes fils, nés de pères différents. Abdelaziz, l’aîné de 10 ans, habite avec son premier époux. Le benjamin, Yliès, deux ans et demi, grandit aux côtés de ses grands-parents maternels, au Maroc. Avec Ryan, l’« enfant du milieu », elle est astreinte à une visite mensuelle, sous surveillance de l’aide sociale à l’enfance. Aujourd’hui, le garçonnet de 5 ans « ne veut pas quitter sa famille d’accueil », remarque le procureur. Le magistrat rappelle que, lors de sa garde à vue à la brigade de protection des mineurs, le 4 juillet 2007, Mina avait avoué qu’elle « ne se souvenait plus de la date de naissance » de Ryan. Et qu’avoir laissé le petit, seul, à une table du fast-food avant de s’enfuir, n’était finalement pas si grave. « Franchement, je n’ai rien fait de mal, être abandonné par sa mère à son âge… il est trop petit pour se rendre compte », avait-elle encore dit aux policiers.

La présidente du tribunal aimerait comprendre les raisons qui ont poussé Mina à se séparer ainsi de l’enfant. « Je ne sais pas… J’ai pété les plombs, j’avais pas de logement, pas de moyens… », répète inlassablement la Marocaine, à la barre. « Elle se présente comme victime de la France — « pays de merde » -, de son mari, qui ne voulait pas de son fils, de la société, qui ne lui a pas fourni de logement, et des médicaments qu’elle prenait, s’insurge Sylvain Barbier Sainte-Marie. « Mais, madame, vous avez compris que vous êtes seule responsable de votre décision » de quitter Ryan, « un enfant qui ne s’attache à personne, qui a pris conscience d’avoir été abandonné, qui redoute de l’être à nouveau », espère le magistrat avant de requérir une peine de deux ans de prison entièrement assortie du sursis et d’une mise à l’épreuve de trois ans.

Une heure plus tard, à peine, le tribunal a délibéré : Mina T. est condamnée à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et au « retrait total de son autorité parentale ». Sans un mot, la jeune mère déchue quitte la salle. La tête dissimulée sous son blouson en simili-cuir gris. Son défenseur glisse aux journalistes que sa cliente ne fera pas appel.