Ces trésors de la République qui disparaissent
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Ces trésors de la République qui disparaissent
Claire Bommelaer
09/02/2009 | Mise à jour : 15:53 |
Depuis dix ans, la commission de récolement des dépôts d'oeuvres d'art s'efforce de recenser les 307 000 objets prêtés par l'État pour orner les intérieurs des bâtiments officiels (ici Matignon). (Delort/Le Figaro)
10 % du mobilier prêté aux ministères et aux ambassades est introuvable. Le ministère de l'Intérieur piste les œuvres manquantes.
je me souviens de cette affaire de ce ministre très connu , dans les années 90 qui avait emmené un tableau qui fut retrouvé chez lui , dans le quartier du marais .
09/02/2009 | Mise à jour : 15:53 |
Depuis dix ans, la commission de récolement des dépôts d'oeuvres d'art s'efforce de recenser les 307 000 objets prêtés par l'État pour orner les intérieurs des bâtiments officiels (ici Matignon). (Delort/Le Figaro)
10 % du mobilier prêté aux ministères et aux ambassades est introuvable. Le ministère de l'Intérieur piste les œuvres manquantes.
Où sont donc passés l'horloge Boulle déposée au château de Maisons-Laffitte, le dessin de Dufy censé se trouver au Musée Cantini de Marseille, le Miro à l'ambassade de France à Washington ou l'huile de Zoran Music (XXe), accrochée en principe sur un mur de Bercy ? Depuis dix ans, la commission de récolement des dépôts d'œuvres d'art s'efforce de recenser les 185 000 objets prêtés par l'État aux ministères, à l'Élysée, à Matignon, aux ambassades, aux consulats ou à l'Assemblée nationale. Depuis 2003, les 122.000 dépôts issus de la manufacture de Sèvres font l'objet de la même enquête. Or, selon des décomptes précis, qui viennent d'être rendus publics, environ 12 % de la collection manquent à l'appel, hors Manufacture de Sèvres. « Ce ne sont pas forcément des Picasso ou des commodes Louis XV. Mais, en tout cas, lorsque l'on demande aux responsables de localiser un bien, on ne le retrouve pas », explique Jean-Pierre Bady, président de la commission.
Sur l'ensemble des dépôts issus du Mobilier national, du Fonds national d'art contemporain ou encore des musées nationaux, 133 000 pièces ont déjà fait l'objet d'un pointage précis, 20 000 ont été «non vues» dont 3 400 sont présumées détruites, principalement par les guerres. Et 16 500 œuvres, pièces importantes mais le plus souvent de moindre valeur comme des Marianne de plâtre, des copies de tableaux ou des affiches, sont dites «non localisées».
Les mauvais élèves sont les ministères de l'Éducation nationale (la moitié des pièces sont «non vues»), ceux de la Défense (39 %) et de l'Économie (36,1 %). En octobre 1984, alors que l'État fait une tournée d'inspection, on s'aperçoit que deux tableaux de grande taille de l'école italienne accrochés au Palais Farnèse, à Rome, se sont volatilisés. Dans les années 1990, une tapisserie du XVIIIe siècle d'une valeur de 80 000 € disparaît, elle aussi, de l'ambassade de France à Londres ; une autre, contemporaine cette fois, mais manufacturée aux Gobelins, d'une valeur de près de 300 000 € est introuvable au ministère de l'Équipement. Les exemples abondent, et, chaque année, les responsables du Mobilier national s'arrachent les cheveux. Car, selon un rapport de la Cour des comptes - qui date déjà d'il y a dix ans -, il règne «une incertitude» sur les causes des disparitions.
1 000 plaintes officielles
Négligence, mauvaise gestion, vol ? Lorsqu'on interroge les ministères ou les consulats, certains contestent même avoir eu en leur possession des objets souvent déposés là avant la guerre. Parfois, les choses se cassent ou disparaissent à l'occasion d'un déménagement : un médaillon d'Henri Matisse, don de madame Matisse, déposé au Musée de Nice, a été oublié au fond d'une caisse lors du déballage de l'envoi. Lorsque l'université de Lille a déménagé pour Villeneuve-d'Ascq, elle a égaré 24 objets d'arts orientaux.
«Souvent, lors d'un changement de ministre, un mobilier va changer de bureau. Personne ne songe à nous avertir puisque cela reste dans les mêmes locaux. Mais peu à peu, c'est ainsi que nous perdons la trace des choses», explique Jean-Pierre Bady. Lors d'un remaniement récent, un ministre bien en vue avait emmené avec lui son bureau - un Paulin - ainsi qu'un immense tapis des Gobelins pour pouvoir en disposer à nouveau dans son nouveau ministère. Et il n'avait tout simplement pas prévenu le Mobilier national.
Et puis, il y a les «grands et les petits arrangements» avec le bien public. Les détournements, les chaises ou les tableaux que tel ministre, tel préfet ou tel ambassadeur «emprunte pour une durée indéterminée», ou dont ils disposent à leur guise. Un ministre, il y a quelques années, avait pris un tableau de maître chez lui. Tableau qui fut récupéré discrètement. La commission de récolement cite également le cas de cet ambassadeur au Danemark qui avait fait faire une copie d'une commode Louis XV afin de pouvoir emporter l'original chez lui. La commission, épaulée par l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC), recense, traque et recherche. « Nous nous concentrons sur ce qu'il faut vraiment rechercher », dit Jean-Pierre Bady qui se targue d'avoir retrouvé 900 œuvres en dix ans. Ainsi, trois tapis de la Savonnerie déposés à la mission permanente des Nations unies, à New York, ont été retrouvés dans une galerie d'art parisienne, un vase japonais du XVIIIe à l'ambassade de France, à Stockholm, et une sculpture romaine derrière une cloison de bois du CNDP (Centre national de documentation pédagogique), à Paris, grâce au souvenir d'un gardien en retraite.
Et puis, il y a les 1 000 plaintes officielles déposées, dont 140 en 2007. C'est peu, mais cela a le mérite d'exister. Dans son bureau du ministère de l'Intérieur, à Nanterre, Pierre Tabel est chargé de les recevoir et de les traiter. « Secret de l'instruction oblige » il n'est pas très disert sur leur contenu précis. Mais on comprend que l'homme et ses quinze acolytes naviguent entre les affaires sensibles et les scandales pur jus. « Pour que je puisse me lancer dans les recherches, il faut que plusieurs critères soient réunis : que la plainte soit recevable, si possible pas trop ancienne. Que l'objet vaille le coup. Et qu'il soit identifiable grâce à une photo ou un dessin », résume-t-il.
Son haut fait d'armes date d'il y a quinze ans. Donné au Musée de Toul, un tableau de Dominiquin (1581-1640), une Vierge et l'Enfant avec saint François d'Assise, manque à l'appel. Pendant la guerre, le musée est en partie incendié et on pense alors qu'il a brûlé. Mais un Anglais affirme l'avoir vu « quelque part » et écrit une lettre à l'Office. « Nous sommes allés à Toul sans le moindre indice. On a fait paraître un article dans le journal local et, le jour même, on a reçu un coup de téléphone : le tableau était chez un notable qui l'avait reçu en héritage de son père », raconte le colonel Tabel. Les faits, anciens, sont prescrits et le tableau est récupéré sans autre forme de commentaires.
Quelques années plus tard un incendie ravage une cour d'appel. À nouveau, on croit un tableau détruit, mais on le retrouve dans une vente aux enchères. Le président de l'époque l'avait tout simplement emporté chez lui. Là encore, les faits sont trop anciens pour engager des poursuites. Et puis, les loups ne se mangent pas entre eux. « Notre but, tempère-t-il, n'est pas tant d'interpeller les fautifs que de récupérer les biens. » Plus récemment, l'Hercule Poirot du patrimoine a mis la main sur des objets de Sèvres de la collection de l'Élysée : ils étaient tout simplement en vente sur eBay. Un attaché militaire, en poste dans les années 1950, avait pour usage d'offrir aux visiteurs des pièces du service à déjeuner de l'Élysée. Quarante ans après, les assiettes avaient transité par tant de mains qu'on pouvait estimer que les vendeurs étaient de bonne foi.
Parfois, les enquêteurs se retrouvent à suivre une fausse piste. Le château de Versailles a récemment déposé une plainte à propos d'une table. Mais cette dernière avait été tout simplement déplacée dans une autre pièce. « Une autre fois, l'Office s'est trouvé au cœur d'un règlement de comptes entre responsables d'un musée parisien. Il n'y avait jamais eu de disparition de tableau », poursuit l'enquêteur.
Montrer l'exemple
Bien que «des enquêtes soient actuellement en cours dans des ministères », il estime que les mentalités ont bougé ces dernières années. Le récolement des œuvres ainsi que la sensibilisation du public autour des questions de patrimoine, finissent par produire des effets. En 2004, une circulaire rédigée par l'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin avait mis un pied dans la porte. Elle rappelait en termes choisis mais fermes que le mobilier national « appartenait à l'État » et que chacun était « tenu de fournir chaque année un état des objets détenus».
La ministre de la Culture, Christine Albanel, s'apprête à faire une communication en ce sens en Conseil des ministres. Et, alors que le Sénat et l'Assemblée nationale étaient jusque-là préservés des contrôles au titre de la séparation des pouvoirs, les enquêteurs ont désormais droit de cité dans les deux Chambres. Par ailleurs, une immense opération de marquage des collections publiques a été entreprise. C'est un travail de titan qui fait parfois appel à des techniques anciennes, comme la pâte à base de noir de fumée utilisée pour marquer les tableaux sans les dénaturer.
Mais le vrai changement viendra par l'exemple : à chaque fois qu'il a un doute sérieux sur un objet de Matignon - et Dieu sait si cet hôtel regorge de merveilles - François Fillon serait ainsi le premier à déposer une plainte.
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