Rwanda : polémique entre Bernard Kouchner et Alain Juppé

Pour le ministre des Affaires étrangères, la France a commis "une faute politique" au Rwanda lors du génocide de 1994. Son prédécesseur de l'époque est furieux.
Cyriel Martin

Samedi, au cours d'une brève visite à Kigali (Rwanda), Bernard Kouchner a déclaré que la France avait "certainement commis une faute politique" au Rwanda, précisant toutefois qu'elle "n'avait pas eu de responsabilité militaire" pendant le génocide de 1994.

Une thèse rejetée par Alain Juppé, prédécesseur de Kouchner à la tête de la diplomatie française, en poste entre 1993 et 1995. Dans un message publié dimanche sur son blog , l'ancien Premier ministre réfute la notion de "faute" : "C'est trop ou trop peu. De quelle faute s'agit-il ? Il faut l'expliquer !" Dans le même message, Alain Juppé met en garde contre "les amalgames de la repentance ou les compromissions de la realpolitik" et rappelle : "Nous avons fait tous les efforts possibles pour aider à la réconciliation des Rwandais."

"On ne comprenait pas ce qui se passait" (Kouchner)

Le rôle de la France dans ce génocide, qui a fait environ 800 000 morts en 1994, reste controversé. Kigali accuse Paris d'avoir soutenu les forces qui ont commis les massacres, ce que la France a toujours nié. "On ne comprenait pas ce qui se passait. Mais il n'y a pas de responsabilité militaire" a estimé samedi Bernard Kouchner, au cours d'une conférence de presse commune avec le président rwandais Paul Kagame, organisée après un entretien de plus d'une heure entre les deux hommes.

"Sauver des dizaines de milliers de vies" (Juppé)

Cette visite était destinée à tenter de renouer le dialogue entre la France et le Rwanda, qui a rompu ses relations diplomatiques avec Paris en novembre 2006. Pendant le génocide, Bernard Kouchner s'était rendu à plusieurs reprises au Rwanda pour tenter notamment d'organiser des corridors humanitaires. Dans son blog, Alain Juppé estime que "la présence de l'armée française a permis de sauver des dizaines de milliers de vies et d'arrêter le flux de plusieurs millions de personnes qui fuyaient vers le Zaïre voisin (devenu République démocratique du Congo). Son intervention est à l'honneur de la France." L'ancien Premier ministre conclut sèchement : "La diplomatie française ne devrait pas s'écarter de la voie de la vérité et de la dignité."

Kouchner n'aurait pas dû serrer les mains d'un sanguinaire. Kagame devrait plutôt parler des crimes commis par le FPR en 1994 au Rwanda et ceux qu'il commet depuis 1996 dans l'est de l'ex-Zaïre. Les Etats-Unis ont bloqué les enquêtes spéciales que comptait mener Carla Del Ponte sur les crimes du FPR mais Kagame doit savoir qu'un jour les Américains vont le lâcher comme ils l'ont fait avec Saddam Hussein et Mobutu !

Si Kouchner est allé à Kigali, c'est qu'il ne pouvait pas faire autrement . Le Rwanda est devenu incontournable dans la région des grands lacs, région où se bousculent les Américains, les Allemands, les Indiens, et bien sûr les Chinois... Si la France doit être absente... Realpolitik.

Kouchner doit cesser de confondre les relations personnelles qu'il a avec Kagame et celles d'Etat à Etat. La France a bien rempli son devoir.

Kouchner est un Cross Carpet. Vous ne savez pas ce que cela signifie ? Alors, je vous explique. Un Cross Carpet est un parlementaire qui traverse le tapis du couloir central d'un parlement pour passer de la gauche à la droite ou réciproquement, afin d'aller brouter l'herbe plus appétissante du camp d'à côté.

... Sarko va se débarrasser de lui. Le PS ne veut pas de lui non plus. Peut-être aura-t-il une chance aux USA, pour une nouvelle embauche comme consultant international. Un french doctor a une chance aux USA.

Kouchner confond l'histoire personnelle qu'il a avec Kagamé (président du Rwanda) avec l'histoire de la France. La France a sauvé des milliers de gens. Combien de personnes Kagamé a tuées au Rwanda et au Congo ? L'Onu parle de 5 millions... Juppé a raison, la France n'a rien à se reprocher.

Je pense honnêtement que la France n'a pas à rougir de son rôle durant les massacres ruandais, car elle a été la seule des puissances occidentales à tenter une action. Kagame, en abattant l'avion de l'ancien président ruandais est le vrai responsable de ce massacre, car rappelez-vous que le Rwanda était dans une phase de dialogue politique. Kagame a donc sacrifié certains Ruandais pour atteindre ses objectifs. Il a en outre massacré des réfugiés hutus dans l'est du Congo ainsi que des millions de Congolais pendant plus de 10 ans.

Bernard Kouchner avec Paul Kagame, président du Rwanda. Le ministre a déclaré que la France avait «certainement commisune faute politique» pendant le génocide de 1994. Crédits photo : AP
Les propos tenus par Bernard Kouchner lors de sa visite à Kigali, qui allaient dans le sens d'une repentance, suscitent des réactions indignées en France.
Le drame du Rwanda est un passé qui ne passe pas. Les réactions déclenchées par les propos de Bernard Kouchner, samedi dernier à Kigali, suffiraient largement à s'en convaincre. Venu ouvrir la voie à une reprise des relations diplomatiques avec le Rwanda, rompues depuis plus d'un an, le ministre des Affaires étrangères a déclaré que la France avait «certainement commis une faute politique» dans ce pays pendant le génocide de 1994.

En privé, le terme a fait bondir plusieurs responsables politiques de l'époque, même si, publiquement, personne ne souhaite jeter de l'huile sur le feu concernant une affaire aussi tragique. Tout de même, Alain Juppé n'a pas hésité à envoyer une bonne volée de bois vert à son successeur au Quai d'Orsay en déclarant que «la diplomatie française ne devrait pas s'écarter de la voie de la vérité et de la dignité». Preuve de son indignation, l'ex-premier ministre a estimé nécessaire de reprendre le blog qu'il délaissait quelque peu ces derniers temps. «Je comprends bien que la France veuille se réconcilier avec le Rwanda, écrit Juppé, qui dirigeait la diplomatie française au moment du génocide. Mais de là à tomber dans les amalgames de la repentance ou les compromissions de la “realpolitik”, il y a un fossé.» Et de poursuivre : «On nous dit qu'au Rwanda la France aurait commis une “faute politique”. C'est trop ou trop peu. De quelle faute s'agit-il ? Il faut l'expliquer !», s'emporte Alain Juppé. Il qualifie de «contre-vérités» les accusations selon lesquelles Paris aurait «pris systématiquement le parti d'un camp contre l'autre, des Hutus contre les Tutsis», «omis de dénoncer le génocide», ou encore «fait preuve de passivité».

Premier ministre à l'époque, Édouard Balladur n'a, pour le moins, guère apprécié les propos de Bernard Kouchner. «Il n'y a pas eu de faute politique de mon gouvernement», déclare au Figaro l'ancien chef du gouvernement, en soulignant avoir «interrompu les livraisons d'armes et retiré les soldats français présents au Rwanda dès (son) arrivée aux affaires».

Hubert Védrine, secrétaire général de l'Élysée en 1994, se dit «complètement d'accord» lui aussi avec Alain Juppé. «Au Rwanda, il n'y a pas eu de faute politique, il y a eu une faute d'évaluation technique. On a tenté d'éviter le retour des massacres grâce aux accords d'Arusha (signés en août 1993 entre l'État rwandais et le Front patriotique de Paul Kagame, NDLR), mais on a sous-estimé les tentations des extrémistes des deux bords, contre lesquels il nous aurait fallu davantage de moyens de pression», explique Védrine.

«Je répondais à une question : est-ce une faute militaire ? J'ai dit : non, c'est politique», s'est justifié Bernard Kouchner, lundi soir, sur France Info. Il a également précisé qu'il ne visait «ni Alain Juppé, ni Édouard Balladur». Qui donc alors ? «L'affaire a au moins le mérite de braquer le projecteur sur des événements dans lesquels toutes les responsabilités ont loin d'avoir été établies, notamment celles de François Mitterrand», relève-t-on dans l'entourage de Kouchner, en évoquant le soutien apporté au régime de Juvénal Habyarimana face à ce que le président de la République de l'époque considérait comme un complot ougandais.

Avant de s'envoler pour Kigali, Bernard Kouchner avait été dûment «cadré» par l'Élysée. Pour Nicolas Sarkozy, la réconciliation avec trois pays africains, Côte d'Ivoire, Angola et Rwanda, figure au rang de priorité. La ligne a été formulée au sommet Europe-Afrique de Lisbonne, début décembre. «Certes, nous n'avons pas toujours su prévenir ou arrêter des drames innommables», déclarait alors le chef de l'État. «Je pense au Rwanda et à son génocide qui nous oblige à réfléchir, France comprise, à nos faiblesses ou nos erreurs», ajoutait-il dans son discours dont chaque mot était pesé.

Réfléchir aux responsabilités de chacun, mais pas de repentance ni de demande de pardon : une ligne que Bernard Kouchner affirme ne pas avoir outrepassée. L'émoi suscité par ses déclarations a toutefois contraint Nicolas Sarkozy à intervenir. Le président de la République a appelé Édouard Balladur et Alain Juppé pour les assurer qu'ils n'étaient nullement mis en cause par les paroles du bouillant docteur Kouchner.

franline a écrit:a changer !!! ou est le siège éjectable ???