Cohn-Bendit lance le débat

Le scrutin européen, c’est « sa » campagne. Depuis plusieurs semaines déjà, Daniel Cohn-Bendit enchaîne les meetings et les réunions pour son rassemblement des écologistes, son « ticket » avec José Bové et la juge Eva Joly, pour les élections européennes du 7 juin. Hier, après une conférence devant la presse étrangère, il a ainsi débattu dans une librairie de Montreuil (Seine-Saint-Denis) sur le « besoin de politique ».

Dans la vitrine du magasin, l’affiche est bien visible : « La librairie Folie d’Encre a invité François Bayrou, Olivier Besancenot, Daniel Cohn-Bendit, Bertrand Delanoë et Ségolène Royal. A ce jour, seul Daniel Cohn-Bendit a répondu favorablement. »
Ambitieux, Danny, tête de liste d’Europe Ecologie en Ile-de-France, vise au minimum les 10 %. Il sait qu’il doit se faire sa place entre le PS et le MoDem de Bayrou. Quand les socialistes et le centriste se retrouvent pour appeler à un vote sanction contre la politique de Nicolas Sarkozy, l’ancien leader de Mai 68 s’énerve. « Il n’y a rien de plus ridicule que d’appeler au vote sanction, gronde-t-il, ça ne veut rien dire. » Conscient que certains pourraient lui reprocher de ne pas assez taper sur le chef de l’Etat, Cohn-Bendit s’empresse de préciser que cela ne signifie pas qu’il est « pour Sarkozy ». « Nous sommes différents de lui, mais nous sommes aussi différents du MoDem et du PS. C’est cela qui peut faire notre attrait », espère-t-il.
Au coude-à-coude dans les sondages avec Bayrou (10 % pour le MoDem, 9 % pour les écolos, selon les instituts), Cohn-Bendit en fait une de ses principales cibles. Interrogé hier sur le peu d’intérêt suscité par cette campagne, il juge ainsi que Bayrou est un des responsables de cette situation. « Moi, je l’aime bien Bayrou, mais il sort un bouquin en pleine campagne des européennes, on se dit que cela va parler d’Europe, ironise-t-il devant une cinquantaine de personnes. Eh bien non, c’est pour dénoncer l’abus de pouvoir de Sarkozy. » Et Cohn-Bendit de reprocher au centriste de ne « penser qu’à la présidentielle ».

« Opposer les poissons et les pêcheurs ce n’est pas bien »

Mais alors que la campagne se déroule en pleine crise de l’emploi, le candidat franco-allemand peine parfois à convaincre ses interlocuteurs de l’utilité du vote écolo. « Opposer les poissons et les pêcheurs ce n’est pas bien, lui assène une participante au débat, l’ennemi ce sont les patrons. » Rattrapé par le chômage, Cohn-Bendit s’applique désormais à mettre en avant le volet social de son programme. Il appelle cela le « green deal » : face à la crise dans l’automobile ou dans la pêche, il propose un « revenu de transformation » permettant à ceux qui perdent leur travail d’être payés pour se former à autre chose. Jusqu’au 7 juin, Cohn-Bendit va multiplier les déplacements. Egalement porte-parole des Verts de toute l’Europe, il entame un marathon qui l’emmènera dans quinze pays de l’Union, une dizaine de villes françaises et une dizaine de meetings en Ile-de-France. Avec à chaque fois la même obsession : « Se différencier. »