Le biologiste condamné à dix-huit mois avec sursis

COMMENT Souhein E., ce biologiste surdiplômé d’origine libanaise, a-t-il pu en arriver là ? En l’espace de quelques jours, celui qui gérait le laboratoire d’analyses médicales des Toupets à Vauréal s’est vu suspendre de ses fonctions pour cinq ans par la chambre de discipline de l’ordre des pharmaciens et condamné par le tribunal correctionnel de Pontoise.

Des sanctions jugées « exceptionnelles » en Ile-de-France.

Hier soir, les juges lui ont infligé dix-huit mois de prison avec sursis et une mise à l’épreuve pendant trois ans pour avoir fait fonctionner son laboratoire sans autorisation et trompé les patients tout en mettant leur santé en danger.

C’est un homme à la personnalité particulière qui s’est approché de la barre du tribunal, persuadé, comme il l’a expliqué, d’être victime d’un complot pour être éliminé de la profession. Son ego est surdimensionné : « Il pense être le meilleur biologiste du monde, le sauveur de l’humanité », explique son avocate. Mais Souhein semble souffrir surtout de troubles de la personnalité. C’est ce que sous-entend le rapport psychiatrique évoqué à l’audience.

« Aucun patient ne se plaignait. Ma crédibilité est toujours là »

Ces éléments permettent de mieux appréhender les faits qui se sont déroulés ces derniers mois à Vauréal. Lorsque l’assurance maladie effectue un contrôle au laboratoire d’analyses médicales, le 14 février dernier, elle relève vingt-trois infractions allant de la présence de matériel périmé et de techniques de prélèvement pas fiables à un manque évident d’hygiène dans les locaux. De quoi remettre en cause les résultats d’analyses rendus aux patients depuis au moins un an. Les dysfonctionnements les plus graves portent sur le dépistage des anticorps anti-VIH 1 et 2 (le sida) et sur celui de la toxoplasmose. Un premier arrêté préfectoral de fermeture provisoire est pris en mars, suivi d’un second en mai, mais Souhein ne veut rien entendre, il poursuit son activité sans réellement tenir compte des procédures qu’on lui demande d’appliquer.

« Aucun patient ne se plaignait, la biologie, c’est ma vie, ma passion, ma crédibilité est toujours là. Si je rouvre demain, tous mes patients reviennent… » explique Souhein, avec de grands gestes. Mais son entêtement est allé plus loin : malgré les scellés posés par les gendarmes sur les portes et les machines du laboratoire pour faire respecter l’arrêté définitif pris en juin, le biologiste y retourne durant l’été. « Nous avons été obligés de faire retirer tout le matériel et de le confisquer », ajoute le procureur de la République, qualifiant l’homme « d’inquiétant et dangereux ».

A sa condamnation à de la prison avec sursis, il s’est vu interdire l’exercice de la biologie, de la pharmacie et de toute autre activité paramédicale. Il devra également être suivi médicalement.

Le sort des nombreux patients passés par le laboratoire durant tout ce temps et dont les résultats d’analyses n’étaient pas fiables n’a pas été évoqué à l’audience.