Russie : un journaliste «tué par les autorités» ?

Magomed Evloïev, journaliste et leader de l'opposition d'Ingouchie, cette République autonome située entre la Tchétchénie et l'Ossétie du Nord qui appartient à la Fédération de Russie, a été tué d'une balle dans la tête alors qu'il venait d'être arrêté par la police dimanche. Selon les autorités, «l'incident» a eu lieu alors qu'il tentait de s'emparer de l'arme d'un agent dans la voiture qui le conduisait au poste de police. L'ouverture d'une enquête pour «meurtre par imprudence» a été ouverte.

Mais pour le représentant de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour la liberté des médias, Miklos Haraszti, on est loin du «meurtre par imprudence». La mort de Magomed Evloïev relève d'un «assassinat» soigneusement «orchestré» par les autorités, dénonce-t-il. «La mort de M. Evloïev est le point culminant d'une campagne orchestrée par les autorités d'Ingouchie pour réduire au silence la seule voix critique dans la région», située dans le Caucase russe, précise Miklos Haraszti dans un communiqué. Et d'ajouter : «Comme le meurtre en 2006 de la journaliste russe Anna Politkovskaïa, cet assassinat représente une nouvelle dégradation de la liberté de la presse en Russie».


Régime de terreur

L'ONG russe Mémorial, l'une des seules ONG indépendante qui travaille sur la Tchétchénie et les conflits dans le Caucase, a renchéri en dénonçant un «nouvel acte de terreur d'Etat». Lundi, plusieurs centaines de personnes ont par ailleurs manifesté à Nazran, capitale de l'Ingouchie, pour appeler le Kremlin à rétablir l'ordre dans cette république en proie à des violences quasi-quotidiennes (enlèvements, attaques contre les forces de l'ordre, meurtres de civils). Ancien procureur, Magomed Evloïev était un opposant radical au régime de terreur que fait régner le président, Mourat Ziazikov, ancien général des services secrets nommé en 2002 par Vladimir Poutine à la tête de cette république de la Fédération de Russie. Il réclamait la démission de Ziazikov, ce qui lui avait déjà valu menaces et procès pour tenter de fermer son site Internet (ingushetiya.ru), dernière source indépendante d'information dans la région. Le 6 juin la justice russe en avait en effet ordonné la fermeture, l'accusant de relayer des informations à caractère «extrémiste». Mais le site fonctionne toujours.