Le président normal du peuple de gauche avait dit " une justice indépendante du pouvoir " ??

Le procureur de Nanterre Philippe Courroye est actuellement mis en cause, sur le plan pénal et disciplinaire, dans l'affaire des "fadettes". ©



"Votre décision s'apparente à un déplacement d'office, c'est-à-dire à une sanction disciplinaire qui ne dit pas son nom et contre laquelle j'entends m'opposer par toutes les voies de droit." C'est une lettre incendiaire que le procureur Philippe Courroye a adressée jeudi au directeur de cabinet de Christiane Taubira, Christian Vigouroux. Dans ce courrier dont Le Point a eu connaissance en exclusivité, le procureur de Nanterre explique que sa mutation est une "sanction disciplinaire déguisée".

La chancellerie a annoncé vendredi matin qu'elle envisageait de muter Philippe Courroye, "dans l'intérêt du service, au poste d'avocat général près la cour d'appel de Paris". Philippe Courroye avait été convoqué mercredi 18 juillet par Véronique Malbec, la directrice des services judiciaires, qui lui avait signifié sa mutation. Dans sa lettre, le procureur de Nanterre conteste point par point les raisons invoquées par Véronique Malbec pour justifier cette "sanction".

Il y explique que la procédure pénale engagée par Le Monde sur l'affaire dite "des fadettes" a été annulée par la cour d'appel de Paris, le 22 mars 2012. Une procédure qu'il précise être actuellement "pendante devant la Cour de cassation" et qui, selon lui, n'a "pour but que de (lui) nuire". Selon le procureur, la saisine du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) par les mêmes journalistes du Monde et pour les mêmes faits est articulée sur une nullité de procédure qui "ne peut constituer une faute disciplinaire résultant d'un manquement grave, répété et délibéré à la loyauté et à la délicatesse". Philippe Courroye cite ici la définition de la faute disciplinaire dans la jurisprudence du CSM.

"Aucun élément objectif"

Le procureur de Nanterre conteste aussi toute responsabilité dans le suicide du magistrat Lionel B. survenu en mars dernier au tribunal de Nanterre. Il s'appuie notamment sur les conclusions de l'enquête préliminaire du parquet de Créteil qui affirmerait que le suicide de ce substitut n'est pas lié à ses conditions de travail, ni à l'exercice du pouvoir hiérarchique.

Bref, pour Philippe Courroye, les "griefs" qui lui ont été notifiés par la directrice des services judiciaires trouveraient donc "leur unique fondement dans les articles de presse et les attaques conjuguées de médias et de syndicats de magistrats au mépris de la présomption d'innocence". "Aucun élément objectif de nature à caractériser un comportement préjudiciable exigé pour le prononcé d'une mutation dans l'intérêt du service ne figure dans mon dossier administratif dont j'ai pu prendre connaissance lors de mon entretien avec Madame la Directrice des services judiciaires", précise-t-il. Et Philippe Courroye de faire référence aux excellentes évaluations dont il a fait l'objet tout au long de sa carrière, et en particulier sa dernière notation effectuée par le procureur général près la cour d'appel de Versailles du 22 juin 2012. Cette dernière "n'évoque aucunement un comportement préjudiciable, bien au contraire". En clair, le procureur de Nanterre refuse sa mutation et se montre décidé à batailler. La balle est de nouveau dans le camp de la chancellerie...