Les ministres à l'heure de l'austérité budgétaire

Il y a ceux qui se terrent, ceux qui maquillent la vérité, ceux qui promettent de continuer le combat. Après avoir achevé un premier round budgétaire avec Bercy et Matignon, les ministères se voient contraints de gérer la «mauvaise nouvelle» publiquement : les années de vaches grasses sont passées, les voilà entrés de plain-pied dans l'ère des économies. L'Agriculture voit ainsi ses crédits baisser de plus de 10 % en trois ans, l'Écologie va perdre 9 %, le Travail et l'Emploi, 14 %. Quant aux postes de fonctionnaires, qui ont longtemps servi aux ministres d'étalon pour mesurer leur pouvoir politique, ils vont drastiquement diminuer. Le gouvernement compte supprimer plus de 30 500 postes l'année prochaine, et seule la Justice pourra encore créer 900 postes en 2009.

Une poignée de ministres Rachida Dati à la Justice, Valérie Pécresse à l'Enseignement supérieur et Yves Jégo à l'Outre-Mer se voient relativement épargnés par l'austérité ambiante. Ce qui leur permet respectivement de mettre en avant «leur capacité à obtenir ce qu'ils veulent à Bercy», «l'importance» de leur portefeuille «aux yeux du président de la République» ou encore leur habileté à avoir «gagné tous les arbitrages». Mais ce type de discours « appartient au passé» , tranche Bercy. « Aujourd'hui, un ministre qui croit que son poids se mesure au poids des euros qu'il décroche se tromperait» , explique doctement Éric Woerth.
Longtemps habitué, grâce à sa proximité avec Jacques Chirac, à décrocher des budgets très importants, Jean-Louis Borloo doit désormais batailler ferme pour récupérer son dû. «Le budget qui a été arrêté pour l'instant ne tient pas compte de toutes les promesses faites lors du “Grenelle de l'environnement” : on va continuer à se bagarrer», promet-on dans l'entourage du ministre.
Michèle Alliot-Marie reste pour l'instant discrète. À la Défense, elle pouvait se targuer d'avoir des crédits sanctuarisés. Mais même la police doit participer à l'effort. «Elle parlera devant le Parlement, à l'automne. Aujourd'hui, cela risquerait d'être anxiogène pour les Français», explique-t-on au ministère.


«Faire mieux avec moins»

Christine Albanel garde elle aussi un silence prudent, en plein cœur des festivals d'été : «Nous attendons le détail, programme par programme, pour communiquer sur le budget de la Culture», explique-t-on Rue de Valois.

Côté Éducation, l'opération consiste à montrer que les 13 500 suppressions d'emplois sont à la fois moins élevées que réclamé par Bercy et Matignon une manière de ne pas se mettre les syndicats à dos , mais beaucoup plus que ce qui était fait jusque-là. «Notre majorité et nos électeurs ont de quoi être contents», calcule-t-on au ministère.

Finalement, «la solution la plus sage, pour un ministre, serait de lier les nécessaires économies à un projet. De faire passer l'idée que l'on peut faire mieux avec moins de moyens», suggère Thierry Saussez, le délégué interministériel à la communication gouvernementale. Lui-même sait de quoi il parle : depuis quelques semaines, il réclame qu'une partie des budgets de communication des ministères lui soit affectée, afin de pouvoir financer les campagnes gouvernementales.