Ces méga-camions bientôt sur nos routes

Ils sont tellement énormes qu’on les appelle les méga-camions. Avec leur 25,25 m de long, ces monstres vont bientôt débarquer sur les routes françaises. Actuellement, les gros semi-remorques autorisés à la circulation ne font pas plus de 18,75 m et 40 t. Mais, à l’exemple de la Suède et de la Finlande qui les utilisent pour l’exploitation du bois, les pays européens sont libres d’autoriser à l’intérieur de leurs frontières des camions plus longs et plus lourds, jusqu’à 60 t.


Plusieurs dérogations existent déjà en France pour des 44 t autour des zones portuaires pour transporter des conteneurs. Comme en Allemagne, au Danemark ou aux Pays-Bas, la France envisage de lancer début 2010, sur certaines routes, une expérimentation supplémentaire avec des camions de 25,25 m, 30 % plus longs que les poids lourds actuels.

Tests en Auvergne
Des essais ont été menés la semaine dernière en Auvergne. Il s’agit de vérifier, comme le vantent leurs défenseurs, si ces camions, capables de transporter de plus grands volumes en moins de trajets, permettent de réduire les émissions de CO2. D’ici à la fin de l’année, la France va donc tester leur « grenello-compatibilité ». Mais les écologistes de l’association France Nature Environnement n’y croient pas. Pour eux, cette décision est en contradiction avec les objectifs du Grenelle de Jean-Louis Borloo en matière de transport des marchandises qui prévoit une augmentation du fret ferroviaire et fluvial. En lien avec la campagne européenne « No Mega-trucks », ils lancent une pétition pour l’abandon de cette expérimentation et demandent au gouvernement de redonner une place compétitive aux transports alternatifs à la route.

Ils sont énormes et font peur. 81% des Français leur sont hostiles, selon un sondage (1). Et c'est en s'appuyant sur leur mauvaise image que la fédération France Nature Environnement a lancé une pétition contre la mise en circulation éventuelle de méga-camions, alors même qu'ils devraient être prochainement expérimentés sur certaines routes de France.

Qu'est-ce exactement qu'un méga-camion ? Un véhicule mesurant quelque chose comme 25,25m de long pour un poids qui peut atteindre les 60 tonnes. A titre de comparaison, les camions actuels font au maximum 18,75 m et 40 tonnes. Le secrétaire d'Etat aux Transports Dominique Bussereau avait fait part de son accord pour leur expérimentation en mars, lors du congrès d'une fédération des transporteurs routiers, selon un communiqué de la FNE publié lundi.

"Trois raisons de dire non"

La demande d'une étude gouvernementale pour autoriser la circulation de poids lourds jusqu'à 44 tonnes - déjà autorisés dans certaines zones de façon dérogatoire - a été adoptée par le Sénat la semaine dernière lors du vote en deuxième lecture de la loi d'orientation du Grenelle de l'environnement. Ce texte doit être soumis au vote d'une commission mixte paritaire.

Il y a, selon FNE, "trois raisons de dire non aux méga-camions" : "ils sont dangereux" et "leur présence sur les routes augmentera le risque d'accidents graves" ; "ils coûtent cher" parce que "d'énormes aménagements routiers seront nécessaires" ; "ils sont polluants" parce qu'ils inciteront à multiplier les camions sur les routes. FNE demande donc "l'abandon de toute expérimentation des méga-camions et la mise en place de mesures efficaces en faveur des autres modes de transport".

L'éventuelle expérimentation des méga-camions de 60 tonnes en France ne plaît pas à tout le monde. Au secrétariat d'Etat aux Transports, on calme le jeu.

Les "megatrucks", ces camions de 25,25 mètres maximum pouvant peser 60 tonnes, vont-ils faire leur apparition sur les routes de France? Aujourd'hui interdits -les limites en vigueur sont de 18,75 mètres et 40 tonnes-, ces mastodontes, qui parcourent déjà les routes de certains pays de l'Union Européenne, comme la Suède ou le Danemark, pourraient débarquer dans l'Hexagone à partir de 2010 sur certaines routes, pour une expérimentation de trois ans.

Des véhicules pouvant peser jusqu'à 60 tonnes bientôt sur les routes de France?

Un test qui ne serait pas du goût des automobilistes: selon un sondage CSA, réalisé auprès d'un échantillon de 1012 personnes les 1er et 2 juillet 2009, 79% des Français seraient inquiets de leur arrivée sur les routes en matière de sécurité routière.

France nature environnement dit non
De son côté, la fédération France nature environnement a lancé une pétition contre cette expérimentation. Céline Mesquida, chargée de mission Transports à FNE, que nous avons jointe, invoque trois raisons: "la dangerosité de ces véhicules sur les routes" (les camions provoquant deux fois plus de décès que les voitures), un esprit "contraire" à la décision prise lors du Grenelle de l'environnement de privilégier le fret ferroviaire sur les longues distances et, enfin, le coût élevé des travaux qui seraient dédiés aux routes si de tels engins étaient autorisés à circuler.
A la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), au contraire, on soutient le projet, qui permettrait de transporter plus de marchandises mais avec moins de camions. Selon Michelle Perruche, de la DGITM, que nous avons contactée, la mise en place de ces méga-camions "entraînerait une réduction du nombre de poids-lourds sur les routes, et par conséquent, une réduction des coûts, et des émissions de CO2."

Ecolo, le méga-camion?
Deux expériences menées aux Pays-Bas -la première de 1999 à 2003, la deuxième entre 2004 et 2007- sont citées par EMS (un concepteur de tels camions) pour défendre ce concept. Si l'on utilisait des méga-camions, le parc routier néerlandais pourrait se passer, selon lui, de 2000 camions (8000 véhicules standard pourraient se faire remplacer par 6000 '25.25'), cela représenterait une baisse de 7 % de kilomètres parcourus, le coût du transport serait réduit de 1.8 %, et les émissions de CO2 de 3 %.
"Un comité de pilotage va être mis en place pour étudier la possibilité d'expérimenter des '25,25' en France, nous explique Lorène Thiebaut, du secrétariat d'Etat aux transports, où l'on cherche visiblement à calmer le jeu. Il réunira tous les acteurs concernés par ces enjeux: professionnels de la route, Sécurité routière, associations environnementales."